Victime de violences conjugales, Charlotte* est suivie par Psy’Script, un site d’accompagnement psychologique numérique de thérapie par l'écrit. Témoignage.
Charlotte*, 37 ans, est l’une des femmes victimes de violences conjugales accompagnée par le dispositif Psy’Script, un service de suivi psychologique spécialisé à distance. Tout se fait via le site Internet, par écrit et en visio. La jeune mère de famille de deux enfants en bas âge, 3 et 5 ans, habite un village rural, loin de tout, avec son église et sa mairie, son café et son école. « Ici, tout le monde se connaît, je ne peux pas sortir, créer des habitudes sans qu’il le sache », explique-t-elle. « Il », c’est son ex-conjoint violent, policier de profession, actuellement sous le coup d’une ordonnance de protection avec une injonction d’éloignement et un droit de visite avec ses enfants de deux heures tous les quinze jours sous la surveillance d’une association de médiation familiale.
Depuis qu’elle a quitté son ex avec un simple sac poubelle sous le bras, Charlotte* et ses enfants sont hébergés dans un lieu d’accueil de jour pour femmes victimes de violences. Désormais dans un chez-elle où elle se sent enfin en sécurité, elle apprécie le soutien quotidien de la plateforme numérique psychologique gratuite. « Avec Psy’Script, je n’ai pas besoin de me rendre à un rendez-vous, tel jour à telle heure. Je peux parler quand je le peux, quand je le veux. Une à deux fois par jour, seule dans mon salon, je me pose pour faire le tri et j’écris ce qui me pèse, me bloque, me fait peur. Venise m’aide tellement : même à distance, je ressens un vrai lien entre nous. Ces réponses me permettent de gérer mes émotions, tous les imprévus, tout ce qui parasite mes démarches avec l’association (justice, logement, travail, finances…) pour m’en sortir. »
À l’autre bout du fil, la mère de famille répond, sans masque, aux questions sur sa vie et son suivi par le dispositif. Malgré le chaos, elle explique avec calme et moult détails sa situation actuelle, toutes les violences subies, les traumatismes de l’enfance. « Dans mon couple, tout est arrivé de manière insidieuse. Il m’a empêché de sortir et faire du sport, m’a coupé de ma famille et mes amies, a contrôlé mes dépenses, m’a rabaissé et a retourné contre moi toutes mes blessures… et il avait l’alcool festif. Moi, je n’ai pas vu le danger, pas mesuré le degré des violences psychologiques, physiques et sexuelles qui montait auquel je m’habituais petit à petit », énumère-t-elle comme pour se remémorer le long processus d’emprise, avant d’ajouter : « Il m’a eue à l’usure. Il instillait la peur – je marchais toujours sur des œufs avec lui – et le doute dans mon esprit, retournant la faute sur moi et se servant de ce qui était important pour moi contre moi. » Charlotte* vient d’une « famille chaotique » comme elle dit, « de cassos » comme lui le dit avec mépris, endeuillée par le double suicide d’un père à ses 11 ans puis d’une sœur homosexuelle à ses 19 ans qui a totalement anéanti sa mère.
Quatorze années durant, son ex-conjoint alcoolisé et armé lui a fait subir des scènes de violence et de viols conjugaux répétées sous leur toit, allant jusqu’à la menacer de lui prendre ses enfants et de la tuer si elle parlait, si elle partait. « Il me disait : ’’je connais bien le coin et les modes opératoires pour qu’on ne te retrouve jamais’’… » Après un bref silence, elle poursuit : « Il m’a complètement détruite, je ne me sens plus une personne à part entière. Mais il ne faut pas que je craque, les petits ont besoin de leur maman, c’est pour eux que je me bats. »
« Je commence à penser à un moi de demain qui existe sans tout ça… » Charlotte*
Si parfois, on a l’impression que Charlotte* digresse, qu’elle bifurque dans son récit, c’est parce qu’elle aussi remonte le fil du cauchemar de sa vie, interrogeant ces moments accélérateurs de sa domination (un grave accident de moto qui la met à sa merci), toutes les soirées où elle doit « virer » ses enfants au plus vite dans leur chambre pour les protéger du danger, ses propres coups et morsures parfois rendus dans la bataille, sa crainte que personne ne la croit…
« Le soutien quotidien de Psy’Script a été salvateur. Grâce à eux, je commence à penser à un moi de demain avec mes enfants qui existe sans tout ça. Toutes ces associations d’aide aux victimes sont tout aussi importantes que les chirurgiens : elles sauvent des vies, la mienne et tant d’autres ! » Si Charlotte* porte toujours en elle les stigmates de toutes ces violences, sur son corps maintenant, elle arbore un tatouage « Scribe fatum ». La preuve, s’il en fallait une de plus, qu’elle écrit aujourd’hui sa propre histoire.
Pour en savoir plus sur le dispositif, lisez le récit Psy’Script, la thérapie par l’écrit
Écoutez l’histoire du projet Psy’Script, un dispositif de thérapie par l'écrit, accompagné en 2023 par l’incubateur d’innovation sociale Première Brique.
Écoutez l'audio de l'article de Psy’Script, le site de suivi psychologique par l'écrit pour les victimes de violences conjugales.
Avec leur projet de douche cyclique écologique, Simon Buoro et Antoine Escande, les deux cofondateurs de Ilya, font partie de la promo 2020 de l’incubateur d’innovation sociale Première Brique. Depuis les deux ingénieux ingénieurs ont déposé des brevets et reçus de nombreux prix d’innovation. Retour sur leur impressionnant parcours et le point sur leurs nouveaux défis.